Cédric, 17 ans
Métal et Cendrillon
Avec sa longue tignasse bouclée et sa passion pour la musique métal, Cédric, 17 ans, détonne parmi les jeunes qui visitent En Marge. Il ne boit pas, il ne fume pas. Jamais il n’a commis de délit. Lui-même ne se considère pas comme un fugueur, bien qu’il ait quitté la maison. Sa famille l’a du même coup mis à la porte. Il a perdu sa trace depuis.
Né d’un père violent et alcoolique qu’il a peu connu, il porte en lui une agressivité qu’il apprend peu à peu à contenir. Petit, il frappait sa sœur cadette. « Ma mère devait s’asseoir sur moi pour que je me calme, je me battais tout le temps. » Il a séjourné dans deux familles d’accueil avant de retourner parmi les siens, à 7 ans.
Le portrait familial avait changé. Un homme s’était installé dans la maison. Leur relation a toujours été à couteaux tirés. Elle est devenue explosive quand Cédric a appris que ce dernier agressait sa sœur. Il était de moins en moins à la maison, il a décroché de l’école, il ne rentrait que pour dormir. Il a avisé sa mère des agressions. Elle l’a giflé, il est parti et a dénoncé la situation aux autorités.
Heureusement, il a rencontré Rose. La femme de sa vie, répète-t-il. Il ne se bat plus. Malgré les mots durs qu’ils se balancent sans arrêt, il vit avec elle un amour fusionnel. Elle peut l’appeler 10 fois en une heure. Ça dure comme ça depuis 18 mois. « Je l’ai surnommée Cendrillon, car elle n’a pas une vie facile. Si elle ne faisait pas bien la vaisselle, elle recevait une claque derrière la tête. Nous allons faire des bébés et nous créer une famille bien à nous. »
Hébergé par le père d’un ami en banlieue, Cédric a d’abord fréquenté En Marge, les nuits où il était sans toit, alors qu’il rendait visite à son amoureuse à Montréal. Depuis quelques semaines, il est en hébergement à court terme, pour deux mois. Officiellement émancipé, il a reçu son premier chèque d’aide sociale et il travaille aux Ateliers d’Antoine, une entreprise d’insertion sociale. Sa copine croit être enceinte. « On veut des bébés », répète-t-il, naïf et joyeux. On lui dit qu’il serait préférable d’attendre, il le sait. Pour lui, la vie ne fait que commencer.